Je respecte les mesures de confinement à la lettre, mais force est de constater que ce n’est guère le cas de tout le monde. Depuis que j’ai ouvert les fenêtres de mon appartement, les mouches se sont invitées par dizaine et dansent un ballet effréné au cœur du salon. Ce n’est pas une saison pour ce genre de diptères, le printemps, c’est demain. Elles sont donc en avance. Sont-elles donc visionnaires ou sommes-nous en retard ?
Je ne suis pas ponctuelle ; Les mouches ont la qualité de l’être. Mais à quoi bon se presser maintenant que nous sommes confiné.e.s ? Elles me fascinent à virevolter dans l’espace, l’occupant sans but, je crois, mais errantes toujours. Cela fait une heure que je les contemple se mouvoir, enivrées par les Nocturnes de Chopin. Ces mélodies m’emportent également, mais contrairement à elles, je suis sédentaire. Mon matelas est devenu un garde-manger, une poubelle, un espace de travail et accessoirement, l’endroit où je dors quand cela m’arrive. Ce n’est pas souvent dernièrement, je peine à me nourrir et à trouver le repos. J’ai perdu un kilo déjà ; moi qui pensais par le passé rédiger un ouvrage pour expliquer les bienfaits de la dépression sur la perte de poids, il me faut maintenant repenser ce projet et le concentrer sur la corrélation entre la quarantaine et la diète.
Je me découvre de nouvelles passions depuis que j’ai remplacé la bière par l’eau. Je me complais dans l’ennui par exemple, il est fascinant. Il suffit de voir comment il s’étire dans le temps sans ne jamais frémir. J’apprends à apprécier les toits des habitations avoisinantes et leurs ardoises moussues sur lesquels viennent se poser les pigeons, aussi ; cela forme une toile inharmonieuse au monochrome grisâtre.
Pourtant, dans l’étreinte étouffante de ces jours silencieux, je demeure une esthète. Je ferais de ces mouches un plafond étoilé.

Je vois qu’en ce 19 mars, je n’étais pas seule esseulée à subir l’ennui. C’est troublant.
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Et l’ennui s’étire malheureusement. Je ne peux m’empêcher de penser à la préface des Fleurs du mal dernièrement.
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